Le bonheur
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LA CITROUILLE
LES ETOILES ET LE COCHON
LE PROPRIETAIRE
BOUDALI
LES VERGERS
MEPHISTO

Y'A DU LARD
LE BONHEUR

La Citrouille retour en haut
Chaque citrouille
peut devenir carrosse.
Chaque citrouille
est, était, sera carrosse.

Pour qu'une citrouille soit,
devienne, redevienne carrosse,
il faut avant tout l'accepter entièrement
en tant que citrouille.

Bonjour citrouille, je t'aime citrouilles
sont les mots qui permettent
et non pas
«légume en voie de développement,
j'aime en toi le carrosse que tu étais
avant qu'un enchanteur qui ressemble au président
t'ait transformé en citrouille
et que tu redeviendras si tu travailles bien.

Il faut également
que la citrouille se tienne le même langage,
il faut qu'elle puisse aimer son coeur
même écrabouillé, y reconnaître la vie
même bafouée.

C'était...
les recettes de Tante Marie Citrouille,
employée bénévole au Bureau du Bonheur Perdu,
passage du Désir.

Citrouille mon amour
je te regarde dans le soleil
je suis avec toi
Dans la terre comme au ciel

Citrouille mon amour
Laisse-moi te reconnaître
Et reconnais-moi
Moi le rat gris
Rabougri
Par un enchanteur aigri
Epicier en gros
Notre ennemi.

je sais que tu es
le cheval ailé
Je sais que tu es
le carrosse chatoyant
Et nous nous envolerons
Nous nous envolerons

Si je te permets
De voir et d'aimer
Mes grosses joues rouges
Dans le soleil

Si tu aimes
Mes moustaches grises
Tremblant sous la brise
Et mes pattes Maladroites
Posées sur ton coeur.

Citrouille mon amour
je te regarde dans le soleil
je suis avec toi
Dans la terre comme au ciel

Citrouille mon amour
Laisse-moi te reconnaître
Et reconnais-moi
Moi le rat gris
Rabougri
Par un enchanteur aigri
Epicier en gros
Notre ennemi.

Les étoiles et les cochons retour en haut
Ah le temps où les étoiles fument
Ah le temps où les cochons s'envolent
Ah le temps où les cailloux s'enrhument
Ah le temps où l'eau a la parole

Ah le temps où les citrons s'allument
Ah le temps où l'or se change en crème
Ah le temps où le temps se déplume
Ah le temps où les personnes s'aiment

Les giroflées crieront
Les fleuves brûleront
Les astres jouiront
Les couteaux fleuriront

Les sources pousseront sur les palmiers dansants
Et les loups rêveront dans le coeur des amants

Ah le temps où les soleils se baignent
Ah le temps où tout le monde est roi
Ah le temps où les orangers saignent
Ah l'amour où les serpents se noient

Le propriétaire retour en haut
Reposons-nous sur cette terre
Car la mort est un long voyage
Sur un océan de poussière
Très loin trés loin de nos rivages

La vie est pour le voyageur
Une plage bien douce et fraiche
Où il peut trouver dans les fleurs
Un corps tout neuf et quelques pêches.

Remercie le propriétaire
Pour les bombes et les barbelés
Les apéros les frigidaires
Les ceintures de chasteté.

Pour les coeurs évangélisés
Anérnones pacifiées
Pour les sexes civilisés
Soleils soleils défoliés.

Remercie le propriétaire
Pour les leçons dans les ordures
Pour l'amour dans les pissotières
Pour les lumières qui suppurent.

Pour les têtes décapitées
Pour les enfants sénilisés
Pour les étoiles déportées
Les paysans dépaysés.

Remercie le propriétaire
Pour les soixante ans de repos
Dans son ile pénitentiaire
Dans son charmant petit ghetto.

La vie est pour le voyageur
Une plage bien douce et fraîche
Où il peut trouver dans les fleurs
Un corps tout neuf et quelques pêches.

Boudali retour en haut
Comme quelques mots sur un papier
Combien de fois je t'ai déchirée
Comme un bruit de pas sur le pavé
Combien de fois mon sang a coulé
Comme un fruit tombé qu'on a laissé
Combien de fois je t'ai évitée
Comme un appel dur dur à fixer
Combien de fois je me suis couché

Sans rien savoir
Sans rien vouloir
Sans rien pouvoir

Mon amour ma liberté
Mon amour ma liberté

Lorsque mes larmes sont de gravier
Tu offres ton cou à mon collier.

Lalalalala lalalalala lalalala

Les vergers retour en haut
Tous les jours à midi
on rassasie les saints
Le soleil amoureux
exerce sa violence

Des ruisseaux de mercure
envahissent les mains
Et des oiseaux dorés
rneurt dans le silence.

Nous sommes tous ici
pour pleurer et sourire
Nous sommes tous ici
pour choisir nos prisons
Nous sommes tous ici
pour tuer nos délires
Nous sommes tous ici
pour mourir de raison.

J'aimais trop les vergers
lorsque j'avais trois ans
Un jour il y a eu
quelqu'un ou quelque chose

Un passant qui a dit
quelques mots en passant
Un soldat enterré
sous le buisson de roses.

Il ne faut pas pleurer
disait l'araignée noire
Et elle consolait
les enfants affligés

A l'heure où le soleil
descendait pour nous boire
A l'heure où je te parle
à l'heure des vergers.

Sommes-nous tous ici
pour pleurer et sourire
Sommes-nous tous ici
pour choisir nos prisons
Sommes-nous tous ici
pour tuer nos délires
Sormnes-nous tous ici
pour mourir de raison.

Mephisto retour en haut
Sucrez vos mouchoirs
Quand vous pleurez
Vos larmes du soir
En seront charmées.

Vous mangerez
Tous les gâteaux
Au grand goûter De Mephisto.

Saoulez vos sapins
Quand vient Noël
Ce sont des lutins
Prisonniers du gel.

Ils danseront
Dans vos lits avec la lune
Et des bonbons
Pour chacun et pour chacune

Et le roi seul
se bercera dans ses bras
il aura froid
tout en haut de son beffroi

Nous irons tous jouer du luth
Au grand couscous De Belzébuth.

Tissez vos habits
Avec du miel
Mangez-les la nuit
La nuit de Noël

Dévorez-les
Avec votre bien-airné(e)
Savourez-les
Sur son coeur et sur ses pieds

Et le roi seul
se bercera dans ses bras
il aura froid
tout en haut de son beffroi

Et nous irons faire bonne chair
Au réveillon De Lucifer.

Sucrez vos mouchoirs
Quand vous pleurez
Vos larmes du soir
Deviendront des fées.

Y'a du lard retour en haut
A Cachan Y'a du vent
A Arcueil Y'a du deuil
A Bagneux Y'a les deux
A Denfert Y'a l'hiver

A Paris Y'a la nuit
Dans les coeurs Y'a la peur

Dans les pubs Et les tubes
Y'a le fric Y'a les flics
ils apprennent La haine
Des fauchés Aux paumés
Des marins Aux rouquins
Des bretons Aux maçons

Chez Giscard Y'a du lard
Chez Dassault Ya du veau
Chez Boussac Du Cognac
Et chez nous Y'a des clous

Les zonards Se bagarrent
Les richards Sont peinards
Les zonards Se bagarrent
Les richards Sont peinards

Dans les bois De nos rois
La haine Se promène
Sa marraine La reine
La mène A la fontaine

L'amour ça Ne paie pas
Sauf en scope Et en pop

Chez Giscard Y'a du lard
Chez Dassault Y'a du veau
Chez Boussac Du Cognac
Et chez nous Y'a des clous

Quand le frère Bat son frère
Le patron Danse en rond.
Quand le frère Bat son frère
Le patron Danse en rond.

Aux Lilas Y'a des rats
A Picpus Y'a des puces
A Saint-Maur Y'a la mort
A lvry Y'a des cris

Quand Henri Tue Ali
Les nantis Sont servis

Chez Giscard Y'a du lard
Chez Dassault Y'a du veau
Chez Boussac Du Cognac
Et chez nous Y'a des clous

Les chacals Vont au bal
Et ma soeur Ell'bat le beurre
Les chacals Vont au bal
Et ma soeur Ell'bat le beurre

Le bonheur retour en haut
Dans les forêts,
dans les villes en braises rouges
au- dessus de la mer,
sur les collines parfumées,
vivait une belle bête chaude et fauve
qu'on appelait le bonheur.
Partout elle bondissait,
elle riait dans la nuit,
partout elle dansait avec le feu
et chantait avec les loups.

Cela se passait dans aucun temps particulier
car le temps voyez-vous est une chose mystérieuse...

Cette bête mangeait
tout ce que les gens lui donnaient,
elle se laissait traire par eux,
elle les pénétrait de son rameau doré
s'ils le désiraient
et elle faisait de la musique
avec leurs veines et leurs cheveux.

Pourtant il y en eut quelques-uns qui la détestèrent
parce qu'elle les empêchait de régner
et que, étant libre et gratuite, elle cassait le marché.
Alors un jour ils vinrent avec des armes,
ils la capturèrent
et l'enferrnèrent
très loin dans une cage.

Cela se passait dans aucun pays particulier
car les pays voyez-vous sont des choses mystérieuses...

Pour que les gens ne se révoltent pas,
ils fabriquèrent
d'innombrables copies de la bête.
Pour qu'ils en soient dégoûtés,
qu'ils n'y comprennent plus rien
et qu'ils l'oublient,
ils la firent bien mauvaise.

La fausse bête
se mit à roucouler,
à jouer au bridge,
à vendre
le soir dans les rues ses tristes appas,
à chanter des opérettes
et à porter des rubans roses
comme on en met dans les cheveux des petites filles
pour les empêcher d'être
ce qu'elles sont elles-mêmes :
des grandes bêtes chaudes et fauves.

Les gens devinrent amers et tristes,
ils ricanèrent, s'empiffrèrent de gâteaux,
se tapèrent dessus avec rage
et beaucoup se moquèrent
du caniche appelé bonheur,
de la perruche appelée bonheur.

Puis ils oublièrent le Bonheur
comme c'était prévu dans le plan,
excepté quelques-uns que l'on rnit à l'hôpital.

Pourtant
dans les yeux de tous les bébés
on peut voir se refléter l'image
de la terrible bête et
il parait que sa chaleur en vérité
est telle que les barreaux de sa cage
sont en train de fondre là-bas très loin où les soldats l'ont laissée.

J'ai rencontré
une vieille, vieille dame
qui n'espérait plus la voir arriver de son vivant
-mais, me dit- elle, je sais qu'elle existe
et après tout c'est l'essentiel-.

Comme elle allait bientôt mourir,
elle ne pouvait pas mentir.